Arrivée au sud de l'Alberta

L'arrivée des Canadiens d'origine japonaise à Picture Butte, au nord-ouest de Lethbridge, en Alberta, 1942.Musée et Archives Galt, 19790283009.

L'arrivée des Canadiens d'origine japonaise à Picture Butte, au nord-ouest de Lethbridge, en Alberta, 1942.

Musée et Archives Galt, 19790283009.

« Il y avait une foule de gens, des agriculteurs et des journalistes. Nous avons essayé de nous cacher et d'éviter que l’on nous prenne en photo. Des tracteurs, des chevaux et des chariots nous attendaient. C'était comme au marché des esclaves. Nous étions terrifiés, ne sachant pas où nous allions. Certains d'entre nous refusaient de bouger. Les femmes pleuraient. Les agriculteurs nous pressaient de nous dépêcher… »

M. et Mme Eiji Tashiro

L'évacuation des Japonais de l'intérieur de la Colombie-Britannique vers les exploitations de betteraves du sud de l'Alberta a commencé au mois d'avril 1942. Près de 370 familles sont arrivées dès la première semaine de juin. Elles ont été envoyées pour travailler dans des exploitations de betteraves des environs de Picture Butte, de Coalhurst, de Diamond City, de Coaldale, de Raymond et de Magrath.

En 1945, les évacués représentaient 65 % de la main-d'œuvre de la production de betteraves et, par conséquent, une force de travail presque indispensable dans la province.


Logement type fourni pour les familles canadiennes d'origine japonaise évacuées dans les années 1940.Dossier d’exposition du Musée et Archives Galt.

Logement type fourni pour les familles canadiennes d'origine japonaise évacuées dans les années 1940.

Dossier d’exposition du Musée et Archives Galt.

Conditions de vie dans les exploitations de betteraves sucrières

« L'évacuation nous avait rendu en colère, très en colère. Mais la colère tua le chagrin et la douleur; puis la colère elle-même tomba du fait qu'il fallait gagner sa vie. J’étais bien trop occupée pour être en colère. »

Une mère japonaise de dix enfants

Lorsque les Japonais sont arrivés dans le sud de l'Alberta, ils ont trouvé les conditions de vie très difficiles. Il y avait des plaintes généralisées au sujet des conditions de logement. Bon nombre de ces maisons avaient été utilisées auparavant, en été, par les travailleurs saisonniers des champs de betteraves; elles n'étaient pas assez isolées et offraient de rudes conditions de vie.

La Commission de la sécurité n'offrait qu'une aide limitée sous forme de matériaux de construction destinés à améliorer les maisons. Les Japonais devaient également participer financièrement au maintien et aux travaux d’amélioration de leurs logements avec le maigre salaire qu’ils gagnaient dans les champs.

Il n'était pas rare de trouver jusqu'à onze personnes, y compris les grands-parents âgés et les jeunes enfants, vivant dans une cabane de 12 pi x 20 pi (3,6 m x 6 m). Ce peuple, connu pour sa propreté, avait du mal à s'adapter à l'absence d'une bonne source d'eau abondante. Il était également difficile d'obtenir des soins médicaux dont les frais étaient élevés à cause de l’éloignement.


Écoliers de l'école de Welling en 1947-1948.Avec la permission de Toshiko Nishimura.

Écoliers de l'école de Welling en 1947-1948.

Avec la permission de Toshiko Nishimura.

Éducation

La scolarisation est également devenue un enjeu pour les Canadiens d'origine japonaise évacués dans le sud de l'Alberta. Le gouvernement fédéral a accepté d’indemniser le gouvernement de l'Alberta pour la scolarisation des étudiants japonais jusqu'à la 8e année. Pour que leurs enfants puissent terminer leurs études secondaires, les familles canadiennes d'origine japonaise devaient payer des frais scolaires allant jusqu'à 70 $ par enfant.

Ces familles ayant déjà du mal à gagner leur vie dans les exploitations de betteraves sucrières, il leur était difficile de trouver l'argent pour payer des frais de scolarité, notamment les familles nombreuses. Certaines familles, dont les enfants étaient envoyés à l'école secondaire de Lethbridge, devaient payer des frais de supplémentaires subsistance.


Hick Hideo Hinastu, Lankey Yoshiaki Tanaka et Tak Ikeda devant les bâtiments couverts de glace du Camp no 6 des scieries Chisholm à Slave Lake en Alberta en 1944.Musée et Archives Galt, 19790284001.

Hick Hideo Hinastu, Lankey Yoshiaki Tanaka et Tak Ikeda devant les bâtiments couverts de glace du Camp no 6 des scieries Chisholm à Slave Lake en Alberta en 1944.

Musée et Archives Galt, 19790284001.

Conditions de travail

Si certaines des personnes évacuées avaient de l'expérience en agriculture, un bien plus grand nombre d'entre eux avaient travaillé dans les industries de la pêche et du bois. Les travaux dans les champs de betteraves sucrières étaient éreintants et une grande partie des tâches se faisait à la main. Pour ceux qui avaient été propriétaires de leurs propres exploitations, bateaux et entreprises, ce travail ingrat auquel ils étaient réduits était humiliant.

Une famille de cinq pouvait gagner environ 1320 $ par an en travaillant sur les exploitations de betteraves sucrières. De nombreuses familles n’auraient pu survivre l'hiver de 1942 sans augmenter leurs revenus. Il a fallu prendre des dispositions permettant aux hommes de travailler dans les camps forestiers et les usines de mise en conserve pour que les familles soient autonomes pendant l'hiver.

Les occasions pour les Canadiens d'origine japonaise de trouver du travail à Lethbridge afin d’augmenter le maigre revenu provenant des exploitations de betteraves étaient limitées et souvent controversées. De nombreux citoyens du sud de l'Alberta s’opposaient à ce que les Canadiens d'origine japonaise quittent les fermes pour travailler en ville.

Ce n'est qu'en 1943 que le Conseil municipal de Lethbridge a approuvé l'embauche limitée de main-d’œuvre japonaise en ville par l'usine de mise en conserve Broder. Même alors, ils étaient étroitement surveillés, obligés de vivre dans les dortoirs de Broder et de retourner dans les exploitations une fois terminée la saison de mise en conserve terminée.

L'usine de mise en conserve Broder est demeurée une source d'emplois pour les Japonais après la Seconde Guerre mondiale.

Voir la section « Réinstallation » pour plus de détails au chapitre « Nisei ».

Les IdoshaGraham Ruttan